8h20, groupe scolaire Marie-Curie, quartier Stalingrad, à Alès.
Eliott, 9 ans, en classe de CM2, rejoint d’un pas tranquille l’école en compagnie de son père : « Il avait hâte de revenir dans sa classe. Ce n’est pas la même chose à la maison ».
Des lignes blanches sont tracées au sol, avec des flèches indiquant le sens des entrées et des sorties.
Le personnel accueille et distribue les casquettes à visière fournies par la municipalité d’Alès. Le tout sous le regard amical, et quelque peu désolé, de Max Roustan, le maire, et de son équipe. « C’est difficile, quand même, de voir ces minots dans cet environnement… Malgré tout, je suis satisfait que nos efforts aient permis de réussir à organiser la reprise. L’État nous a laissé nous débrouiller seuls et c’est ce que nous avons fait. Il y a eu une implication remarquable des agents de la Ville et du personnel enseignant. Un engagement de tous qu’il faut saluer, car même s’il y a encore peu d’élèves, le travail d’organisation et de gestion de la situation est colossal », insiste le maire d’Alès.
Déconfinement
Depuis le 11 mai, le déconfinement entraîne la réouverture de certaines structures ou magasins, mais impose aussi de nouvelles modalités de fonctionnement.
Vie quotidienne, déplacements, commerces, loisirs, accueils des enfants, animations sportives et culturelles : faisons le point sur ce qui est ouvert, fermé, annulé, maintenu ou reporté pour les mois à venir.
Des effectifs encore peu nombreux
Les élèves arrivent au compte-gouttes. Les écoliers entrent par horaires échelonnés.
« C’est compliqué pour tout le monde en fait, reconnaît Anne Oriol, la directrice du groupe scolaire Marie-Curie. Nous attendons trente-quatre enfants sur les cent vingt accueillis habituellement. Dans chaque section, nous avons entre six et neuf élèves ».
Christian Chambon, élu délégué à l’Éducation, s’inquiète du retard que les élèves prennent sur les apprentissages et les décalages qui se creusent selon les différents quartiers de la ville : « Ici, c’est l’une des écoles qui accueillent le plus d’enfants, mais dans d’autres quartiers, il n’y a parfois que quatre ou cinq élèves… Et c’est problématique : pour l’apprentissage, certains enfants se retrouvent avec une perte de près de 50 % de leur temps d’école. Au collège Racine (dont il est le Principal, NDLR), nous n’aurons que cinquante-cinq élèves de 5es et 6es lundi 18 mai, au lieu de trois cents. »
Un protocole très encadré et respecté
Des points de couleur ont été peints sur le sol de la cour, ainsi que des numéros de places sous le préau. À son arrivée, l’enfant se place dans la cour sur un point et attend. C’est une ambiance particulièrement étrange : une cour quasiment vide, silencieuse et des enfants de CM2 qui semblent presque perdus dans une école qui est pourtant leur lieu quotidien de vie.
« Je suis content de revenir, même si certaines choses sont mieux à la maison, avance Eliott. À la maison, on peut faire un peu plus la grasse matinée ».
Fin de la “récréation”. Chaque enfant se place sur un numéro, sous le préau, puis attend son tour pour se laver les mains. Valérie Gérard, professeur de CM2, répète aux enfants le protocole à suivre et mime la manière de se laver correctement les mains. Les élèves montent ensuite en classe en file indienne, en restant à un mètre de distance les uns des autres. Dans les couloirs, des repères indiquent chaque mètre linéaire. Quant aux rampes d’escalier, elles sont couvertes par de la rubalise. Défense d’y toucher.
En classe, Valérie Gérard accueille sept élèves de CM2 : « On s’assied et on ne touche plus à ses affaires, leur dit-elle d’emblée, avant de leur souhaiter la bienvenue. Je suis heureuse de vous voir, mais j’ai quand même envie de pleurer, car cette situation est triste, confie-t-elle à ses élèves. Et vous ? Comment vous sentez-vous ? Que ressentez-vous ? »
Timides, Déborah, Iris, Eliott et leurs camarades expriment calmement leurs sentiments, leur peur d’attraper le virus ; mais en même temps, ils sont contents d’être là. « C’est compliqué maîtresse », résume l’un d’entre eux dont la voix est étouffée par son masque fait maison.
Les enfants de maternelles un peu perdus
En maternelle, dans la cour, les jeux sont fermés par de la rubalise.
La directrice, Anne Gascuel, dont c’est le dernier mois d’activité, parvient à garder un large sourire derrière son masque.
Sur les quatre-vingts élèves présents habituellement, une trentaine peut être accueillie désormais, soit huit enfants par classe. Ce matin, ils sont dix : trois chez les grands, trois chez les moyens et quatre chez les petits.
« Les parents sont prudents. Ils attendent de voir comment ça se passe. Il y aura peut-être plus d’enfants dans les prochaines semaines », estime Anne Gascuel.
Les activités habituelles se mettent en place avec un temps de parole plus long que d’habitude. Ici aussi, les petits semblent déstabilisés, comme perdus dans leur propre classe où habituellement vingt-quatre camarades se côtoient.
« Il y aura un coup psychologique évident sur les enfants. Peut-être pas les premiers jours, car ils ont envie de reprendre l’école et revoir leurs amis. Mais le quotidien, avec un protocole très strict, va marquer les esprits. Il faut davantage de souplesse, remettre de l’humain en espérant que la rentrée de septembre puisse se faire dans des conditions optimales pour tous », affirme Christian Chambon.